On s’est beaucoup interrogé sur le rôle d’un coach agile. Et il y a eu plusieurs branches d’évolution. J’ai défendu depuis longtemps que le coach agile est manager opérationnel. Je disais aux coachs chez benext (une sorte d’esn qui a existé dans les années 2015-2020 et que je dirigeais avec David) : vous êtes des managers et à chaque manager, je disais : vous devez-vous comportez comme des coachs.
À l’époque l’hémorragie c’était l’affluence de toute une population vers le coaching agile parce que cela semblait facile et que cela rapportait. Remercions cette vague qui a foutu en l’air l’utilisation du terme agile : esn, ssi, shadoks de la dsi, amuseurs publics, et les coachs en permaculture non violente de tes émotions.
Et voilà, soit d’un côté on avait les chefs de projets des grosses boites IT qui se déguisaient ou s’imaginaient agiles et flinguaient toute la cohérence agile, soit de l’autre des gens qui n’auraient pas du être là, se prenaient le mur et s’échappaient par des serious games hasardeux ou des postures de coaching (souvent sans rigueur) professionnel, le vrai coaching, mais mal fait, et qui ne correspondait pas aux attentes.
C’est loin d’être fini, si vous vous glissez dans les couloirs d’une grosse boite, dans une DSI, dans une digital factory, ou ailleurs là où c’est “agile”, vous entendrez probablement que les coachs agiles ne font rien et qu’ils le revendiquent, normal, ils sont coachs avant d’être agiles (et bien souvent ils ne sont jamais agiles). Donc ils murmurent à l’oreille des gens qui ont envie d’asmr ou ils sortent leurs Legos.
Et là, moi je dis : ben oui un coach agile c’est d’abord un manager opérationnel. Il est actif, il a de l’impact, il fait.
Et tout le monde : “ben ouais, bien sûr, on le disait bien que c’était que des grosses feignasses !!!”, ou encore “Ben oui ils sont responsables des résultats, sinon ça ne marche pas, et ils donnent des ordres”, ou encore “allez j’avais dit que c’était des delivery manager, des chefs, y’en a marre de dessiner des marelles aux murs”.
Oui, mais il y a un mais.
Le coach agile est un manager opérationnel, mais PAS DU TOUT comme la très grande majorité l’entend.
Cette très grande majorité ne voulait surtout pas faire de l’agile, mais bien ce bon vieux le command and control à l’ancienne, qui amène des résultats médiocres, mais permet une inertie en béton, des échecs réguliers et sereins. Et qu’est-ce que désirent les gens dans ce monde sans queue ni tête ? Du calme et de l’inertie. Que les résultats soient au rendez-vous, on s’en fout, que l’on fasse les choses bien, on s’en fout.
En tous cas une grande partie imagine dans le propos : “le coach agile est un manager opérationnel” que l’on revient au bon vieux chef, que l’on s’était égaré et que tout redevient comme avant.
Dans cette très grande majorité, il y a aussi les coachs en émotion non violente qui développent votre jardin interne, ceux-là ils se sont pris de plein fouet la réalité, ils ne se sont pas du tout positionnés où et comment ils auraient du le faire, et ils se sont donc pris le mur. Comme ils ne comprennent pas nécessairement l’agilité, et qu’il n’observent qu’échecs, ils se disent que, si on n’aime pas cultiver comme une girafe ses émotions, et bien c’est que l’autre façon de faire c’est forcément chef à la dure.
On va le redire même si on le sait depuis longtemps : le coach agile façon manager opérationnel est une évolution du management traditionnel (command and control), qui se tourne vers le “donne un cadre et donne du sens, une direction”. Et donner un cadre, cela veut dire bloquer, stopper, contraindre. Ça n’a rien à voir avec commander, donner des ordres, pousser. On cultive (non non ne revenez pas les jardiniers) l’autonomie des groupes de personnes, mais on cadre l’espace de l’autonomie, et on cadre le processus (Scrum – oui c’est toujours très bien – ou Kanban – c’est toujours très bien –).
Alors, je ne vais pas réexpliquer tout cela. Faut pas cadrer de façon étouffante, faut avancer avec des éléments pas trop gros qui portent du sens, etc. Il faut des contraintes, mais à bonne dose. Partager beaucoup d’informations sur ce qui se produit, faire comprendre un sens une direction, mesurer, mesurer, mesurer les impacts. Clarifier les règles, adapter la taille des groupes, modulariser, modulariser, donner de l’autonomie, et appuyer la diversité et les interactions quand c’est nécessaire. Tout cela c’est poser un cadre, gérer cet espace. Vous avez des contraintes, de la visibilité sur ce qui se produit, des résultats (bons ou mauvais). Etc. Etc. Etc. Il vous suffit de plonger dans les articles, les vidéos, et autres de mon blog (ou de lire le petit manuel de pensée organisationnelle).
Mais c’est bien vous qui bloquez les processus foireux, qui contraignez les espaces obscures à plus de clarté, vous qui appliquez des contraintes (trop et le système se braque, pas assez et vous ne servez plus à rien). Ou à l’inverse vous qui cassez les processus trop verbeux, inutiles, obèses ; vous qui coupez dans les lianes des communications alambiquées pour que l’on y voit plus clair ; vous qui creusez à la recherche d’une direction claire, etc.
Et ce n’est toujours pas vous qui demandez des estimations précises (du travail inutile), qui dites à chacun ce qu’il doit faire, qui décidez de rien, ou bien de tout. Qui ne mettez jamais les mains dans le cambouis, ou qui ne levez jamais la tête du cambouis. Regardez host leadership dans ce blog (là et là)!
Le truc c’est que cela concerne TOUS les managers. Le coaching agile c’est le nom du management moderne, à tous les étages.
Par contre j’insiste : ceux qui pensent et qui imaginent que la solution c’est une sorte de retour en arrière, ils se fourrent le doigt dans l’œil jusqu’au genou. Or c’est bien cela que l’on observe, un retour arrière lié à un stress, et pas une compréhension du management qui propose un pas en avant.
À ceux qui veulent des coachs agiles opérationnels, vous savez où me trouver.