Le blues du coach

Coach un peu cabossé. Ne saurait répondre précisément à vos demandes, mais pourrait aider. Saura trouver de la valeur si vous le mélangez à votre intelligence collective. Pourrait apporter un peu de sel. Occaze à saisir. Alimentation en feedback nécessaire.

Une réflexion rampante depuis quelques temps dans mes conversations : l’usure de notre métier, la difficulté du feedback pour les “coachs agile”. Notre métier est difficile. Difficile car complexe, sans réponse simple. Difficile car usant, passionnant mais usant. Je ne cesse de répéter aux gens que je croise que le feedback est essentiel pour rester impliqué, engagé, voire motivé. Il est nourrissant de savoir ce que génère nos actions, nos choix, nos décisions. Que le résultat soit bon ou mauvais, c’est toujours mieux que le silence, l’ignorance ou l’absence de résultat. Or notre métier de “coach agile” n’est pas adapté à cette boucle de rétro-information car il a propose tellement de ramifications que les messages retours sont flous.

Je jalouse les “coach craft”

Déjà je jalousais les “coach craft” (ces coachs experts artisans de la matière code) car ils avaient la faculté de transmettre leur savoir assez directement, ne serait-ce que par mimétisme. Ce qui me parait déjà bien plus ardu pour un coach organisationnel. En effet, il est difficile de dire : fait comme moi, car nous sommes tous tellement différents. Le matériau n’est pas le code, l’outil, mais la personne elle-même. Et je ne parle pas de coaching individuel, mais je parle de communication, de dynamique de groupe, etc. Donc ainsi il n’est pas aussi facile de transmettre que dans de nombreuses autres professions. On peut montrer comment on s’y prend, expliquer sa démarche. Mais chaque personne va faire avec sa nature et son contexte. Le résultat sera forcément différent. Pas de répétabilité.

L’incertitude c’est passionnant mais ce n’est pas reposant.

Nous sommes des affamés de feedback

Non content de ne pouvoir transmettre aisément notre savoir, nous pouvons aussi être assez aveugle ou inquiet sur notre faculté à apporter de la valeur. Nous sommes des affamés du feedback. En fait pas plus que les autres. Mais le feedback est essentiel à notre motivation, à notre engagement, comme tout le monde. Nous en avons donc besoin. Pour un coach agile, pour reprendre l’étiquette que l’on nous colle, il est difficile d’avoir ce sentiment de progrès, sentiment d’avoir un impact. En dehors de tous les aspects liés à l’ego qui ne sont pas mon sujet, c’est quand même agréable d’avoir un quelconque feedback sur lequel se reposer. Être coach agile c’est usant. Je ne me plains pas. Cela me passionne. Mais c’est usant. Notre matière est l’intelligence collective, l’organisation, la dynamique de groupe, etc. Tout cela est bien immatériel. Nous ne modelons pas notre matière nous l’accompagnons et jamais seul. Quand ça marche ce n’est jamais exclusivement ou même principalement grâce à nous, c’est le fruit d’une combinaison de personnes, de sens, de chance, de moments opportuns. Ce n’est pas une question d’ego, c’est une question de savoir, d’amélioration, d’introspection.

Je jalouse le fleuriste, le bucheron, le codeur, le trader, le maitre nageur, le chirurgien

Ils vendent des fleurs ou non. Les plantes poussent ou pas. L’arbre tombe ou pas. Le code compile ou pas. On refactorise le code ou pas. Cela marche mieux ou pas. L’action se vend à meilleur prix ou pas. Quelqu’un se noie ou pas, quelqu’un apprend à nager ou pas. Le poumon est recousu ou pas. J’ai cherché des professions proches de la notre. Toutes celles intellectuelles me dit on. Le romancier, le professeur, le journaliste, l’acteur, le philosophe. Mais le journaliste et le romancier sont faces à eux mêmes. Ils peuvent être torturés mais ils ont les cartes en main, tout comme l’acteur. L’acteur de théâtre a une matière plus compliquée : elle fluctue. Son souci c’est plus d’être ou de rester inspiré, talentueux. Le professeur a une relation plus bidirectionnel avec sa classe. Il demeure le professeur. Nous travaillons avec des dynamiques de groupe qui nous englobent, dans un monde systémique, holistique, global, qui ne peut se réduire à une sous-optimisation.

À vot’ bon cœur

Quelques bribes de feedback ? Des miettes d’encouragement ? J’en ai reçu, assez souvent finalement, mais dans la masse de mes activités elles se perdent. Les gens qui font mon métier ne sont-ils pas les champions de l’introspection et de la remise en question ? Sûrement et tant mieux. Alors apportez leur votre feedback.

Oh yeah, baby, J’suis pas fleuriste, ni bucheron Je suis le vampire de l’apprentissage J’suis pas chirurgien, ni horloger Le bootleneck de ma guitare coince l’orga, bebabelula, J’suis pas le grand nageur qu’est devenu acteur J’ai le blues du coach agile, le spleen du facilitateur, ma came c’est le feedback, tchtchi chak