Atelier esprit d'équipe
Les semaines passent… et se ressemblent. La semaine dernière je vivais une journée dans l’ambiance Art Déco du Bœuf sur le toit. Cette semaine c’est une journée dans un cabinet d’avocats où des marbres et dorures magnifiques (probablement du XIXème me glisse Lahouari) donnent un allant à tous les ateliers mais m’interdisent d’accrocher quoi que ce soit aux murs…
Objectif de la journée : bâtir un esprit d’équipe, du team building et idéalement repartir avec quelque chose pour le lundi suivant. Une vingtaine de personnes, plutôt dans le domaine du bizdev, de la finance et du juridique. On m’explique qu’il peut y avoir des acrimonies, des tensions, et avant toute chose qu’il faut ouvrir un espace de parole et rendre visible tous les actes et vandalismes non verbaux sous-jacents pour les atténuer. Je propose alors de me faire accompagner par Boris afin d’avoir une double voix : l’une orientée vers l’organisation, la facilitation, le management, et qui mènera le fil rouge de la journée, moi, et l’autre orientée dynamique individuelle et d’équipe qui opérera plus comme une voix off pour le groupe ou pour des personnalités, Boris donc, que je connais de longue date et avec qui je fais missions et conférences. Boris que nous faisons régulièrement intervenir chez beNext. Si la même personne mêle ces deux voix elle perd en intelligibilité.
Va donc mettre un post-it sur ces murs…
Bref. Ma stratégie est de partir d’une réconciliation pour aller vers l’action. Une première étape autour d’une rétrospective sécurisée (sans mélanger les groupes), puis un atelier Give and take transformé en atelier “needs”, puis j’imaginais un kanban pour rendre visible à tous le processus complet d’un projet mais Dragos m’a astucieusement conseillé de basculer carrément sur un event storming (dont Alberto m’avait fait une démonstration à ALE 2015 et j’utilise de ci de là depuis). Enfin une scierie à pratiques pour donner un relief et une action à l’event-storming. Je reviens sur tout cela ci-dessous.
Rétrospective et saynètes
D’abord donner un espace de parole, de partage, de compréhension pour atténuer les crispations dont on me dit qu’elles fleurissent dans l’équipe. Faire comprendre à chaque groupe la vision de l’autre. Bonne pioche pour Boris qui met en évidence par la même occasion un triptyque émotion, action, pensée qui se répartit bien entre les trois sous-groupes (finance, bizdev, juridique) et qui explique aussi certaines incompréhensions (on dit la même chose mais personne ne comprend l’autre, ou ne l’écoute avec le bon canal). On débute par une rétrospectives étoile de mer (plus de, moins de, continuer à, arrêter de, commencer à) assez classique. L’intérêt étant pour chaque groupe de présenter ses réflexions et le ou les deux points clefs qui en ressortent aux autres groupes. Énoncer à haute voix, expurger, clarifier.
Puis pour aller plus loin je demande à chaque groupe de jouer des saynètes autour de ces éléments clefs qui sont ressortis. Comme toujours personne n’est obligé de jouer, on peut jouer avec des notes, on peut souffler. Pour moi il y a deux éléments importants. Premier point : la préparation, la conversation sur les scènes à jouer. Ceux sont des moments physiques, très palpables, à imaginer ou retranscrire. On touche du doigt une réalité (même si on l’exagère souvent). Deuxième point : la personnification. On prend la peau de, ou on voit quelqu’un qui nous personnifie. Là aussi de la caricature, tant mieux, elle dédramatise, elle donne de la bonne humeur. Mais soudain ce n’est plus du discours mais du ressenti, palpable.
Give and take = needs
L’atelier Give and take c’est l’idée d’une matrice qui permette à chaque groupe d’évoquer ce qu’il prend (take) et ce qu’il donne (give) aux autres. Dans mon cadre je le simplifie à “qu’est ce que vous attendez de l’autre groupe” (needs) dans le contexte que l’on se donne (ici la poursuite de projets bizdev). On ne juge pas, on n’attaque pas, on sera peut-être en désaccord, et ce n’est pas grave, on clarifie juste les attentes de chacun, où chacun projetait l’autre. Boris en profite pour ajouter une couche de communication non violente dans l’expression des attentes. L’atelier rempli son objectif, on découvre des gaps, des tensions, des manques. Maintenant on les connaît.
C’est la pause, et un petit jardin intérieur, à deux pas des Champs-Elysées, se révèle. Dans la verdure j’appelle ma muse. J’observe le groupe. Le repas ce moment décisif. On rigole. Une personne nous demande si on était dans le dernier “Capital”. On rigole encore plus. Interdit de me vanner là dessus !
Event Storming
Après une introspection et une personnification (la rétrospective et les saynètes), puis une clarification des attentes des périmètres de chacun (give and take) on attaque un gros morceau : un event storming du processus projet. On clarifie encore, en groupe, mélangé cette fois, toutes les étapes d’un projet, les acteurs attachés à chaque étape, les adhérences externes, les déclencheurs, les données clefs. Cela complète parfaitement la matrice des attentes, donne du relief dans le temps, aligne tout le monde sur un processus commun, partagé. On commence déjà dans les discussions à ajouter des élément que l’on estime manquants.
C’est un travail physique, où chacun travaille sur la même matière. La lecture est donc partagée. Le relief est donné par une ligne de temps et les densités, goulots, matière des post-it. Les éléments physiques limitent aussi à l’essentiel. Les densités de couleurs font apparaître des dérives (trop de jaune, trop de participants, probablement trop de silos…).
Event Storming est un élément très clarifiant pour un groupe. La photo en haut à gauche le montre bien.
Scierie à pratiques : relief et action
Quand tout le monde s’accorde à dire que le métier est ainsi bien représenté (par l’event storming) alors par un dernier atelier (une sorte de scierie à pratiques) j’essaye de donner du relief (sens et priorisation) et une première action (pour changer il faut y aller étape par étape, par cycle, dans un espace protégé).
On demande donc à chacun de désigner dans l’event storming le moment qui lui parait le plus essentiel, le plus stratégique. Et pourquoi à ces yeux c’est ce moment là. Le pourquoi, le sens. Puis on découvre que cela représente grosso modo trois groupes, sur trois phases clefs : structuration, arbitrage, et clôture de l’affaire. A chaque groupe je demande de réfléchir un peu et de s’attribuer une note sur dix concernant ce moment qu’ils estiment si important dans cette frise représentant leur domaine. On obtient, par exemple, 4/10, 4/10 et 8/10. À chaque groupe je demande ensuite de brainstormer et de m’expliquer ce qu’ils vont faire dans le mois à venir pour augmenter cette note de un ou deux points. Il s’agit pour réussir un changement de ne pas voir trop grand. Avoir quelque chose de concret, activable. Note : les groupes sont désormais hétérogènes par rapport aux groupes initiaux pour le brainstorming.
J’ai aussi demandé quel passage de l’event storming leur semblait inutile ou anecdotique. Il n’y en avait pas, mais le cas échéant on aurait pu essayer de ne plus faire cette activité le mois suivant, pour essayer (le changement est facilité si on peut revenir en arrière, on essaye donc simplement).
Voilà il m’a semblé que c’était un bon parcours, qui faisait sens. D’une phase analytique, introspective, qui pouvait expurger des choses, à une phase clarifiante (matrice et event storming), qui déclenchait un travail de groupes hétérogènes, pour s’ouvrir sur une phase avec des actions concrètes, simples, réalistes, activables dès le lundi suivant. Encore une fois, si vous essayez le même déroulé n’hésitez pas à me faire part de vos retours.
Puisque l’on parle finance en ce moment aussi : le DAF/CFO Agile avec agilecfo.