Le problème de la bienveillance 18 févr. 2021

Dans les années 1880, Nietzsche écrit “La généalogie de la morale” (1887). Dans ces ouvrages (il y a une série “Par delà le bien et le mal”, “Généalogie de la morale”), il recherche un renversement des valeurs. Il s’attaque à l’opposition du bien et du mal, du bon et du méchant. Il ramène cette généalogie à proprement parler à une opposition historique de classe, de groupes de pouvoir. Étymologiquement explique-t-il le “bon” est dans de nombreuses langues, le noble, le guerrier, le maître. Celui qui dominait, qui combattait, qui jouissait, le fort. Celui qui ne se posait pas de question sur le bien et le mal, le bon et le méchant, car ce n’était pas son sujet, ce n’était pas un sujet, lui, il vivait. C’est par opposition l’opprimé qui a créé cette définition. Pour Nietzsche, au faible il ne restait que cette faiblesse. Et le faible, l’opprimé, le non-noble, le non-fort, celui qui ne jouissait pas de la vie, a essayé au fil des ans de transformer cette faiblesse en force. Il s’est décrété le bon, car pour lui c’était le sujet. Et de sa faiblesse il a essayé d’en faire une force. Qu’il ne puisse pas jouir de la vie il a appelé cela patience par exemple, que le faible, le non-noble, soit légion vis-à-vis du noble, et comme il subissait, il a fait de la solidarité, de la bienveillance, entre les personnes des vertus. Vertus qui ne viennent même pas à l’esprit du noble, du guerrier, du fort, car cela ne le concerne pas. Ainsi Nietzsche explique une inversion des valeurs : le “bon” à l’origine, le chevalier, le guerrier, le noble, le fort, le chef de la horde, est devenu le méchant aux yeux des non-nobles, des non-guerriers, des non-forts, des non-chefs. Le “méchant” est l’opposé de celui qui se pense “bon”. Et dans le récit de Nietzsche c’est bien historiquement les faibles qui ont gagné, et donc les “bons” sont devenus historiquement les non-forts, les non-chevaliers, les non-guerriers, les non-chefs de horde. Et les vertus qu’ils s’octroyaient sont devenues des valeurs plus répandues (la patience, la bienveillance, la solidarité, etc.). “Vertus” qui n’en ont que le nom puisqu’elles ont été définies en réaction, et qu’elles ont été créées avec la seule matière disponible du faible aux yeux de Nietzsche. Cette inversion des valeurs m’apparaît passionnante, car elle ramène la complexité à tous les niveaux. Même dans les vertus dont certains se drapent beaucoup aujourd’hui (solidarité, bienveillance), il y a un combat, une lutte. Dans chacune de ces vertus – solidarité, bienveillance – se cache une lame, une arme.

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Difficile fin de carrière pour Scrum 3 janv. 2021

C’est l’histoire d’un groupe de rock. Un duo. Un vrai duo rock. Ils n’ont pas fait Woodstock, ils n’ont pas été roadies de Mötorhead, mais l’un d’eux a été pilote pendant la guerre du Vietnam. Dans les années 90 quand on pense que le rock est mort il lance “Scrum”, leur groupe. Il faut du temps pour percer. Au tout début des années 2000 pendant un festival de musique underground un mouvement plus global dont ils font partie prend forme. C’est un tremplin pour eux. Le milieu des années 2000 voit les grands groupes devenir des vrais dinosaures. À l’instar du punk des années 70, du Grunge des années 90, ils sont le fer de lance de la rupture au milieu des années 2000. De underground ils deviennent les têtes d’affiche.

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Le grooming cette erreur 26 nov. 2020

Laissez-moi un peu de temps pour m’expliquer. Mais le sujet est revenu trop souvent dans nos intervisions cette semaine. Je vais d’abord pousser le bouchon : le “grooming” (l’affinage) c’est une erreur. Comme la “définition de prêt”. Ce qu’ils sont devenus c’est des cache-misère. Maintenant je vais adoucir mon propos et vous expliquez l’éclairage que j’aimerais partager le plus possible.

Le grooming est né pour palier à la situation : en plein sprint planning le product owner est venu avec une user story et patatras : mal découpée, ou trop grosse, ou des dépendances terribles qui se découvrent, etc. Et donc c’est le chaos. En dehors du fait que le chaos est souvent source de créativité, je peux comprendre que c’est fatigant et si c’est créatif, ce n’est pas forcément productif. Bref, le grooming est né pour anticiper ces moments de chaos et fluidifier les sprint planning. À raison.

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Une possible histoire de l'agilité, COACH, SM, PO, UX, PM, DATA 9 nov. 2020

En face d’un groupe de UX (user experience) lors d’un de nos fréquents événements chez benext. J’essaye tant bien que mal de donner de la perspective à ce rôle, je me lance dans une “possible histoire de l’agilité”.

J’écris cela avec le sourire : 1999, XP (extreme programming) voit le jour. Quelques bouquins de Kent Beck fleurissent sur les tables. Certains se lancent. 2003, le choc brutal de la crise range beaucoup de cela dans les armoires, et le côté extrême de la communication finit de le mettre dans l’ombre. 2005 ou 2006 un petit fascicule de Henrik Kniberg décrit des parties de poker un peu drôles au milieu des développeurs. Il suscite un intérêt. En 2008 une nouvelle crise économique surgit. C’en est fini des CMMi et consorts, gros trucs lourdingues has been. Les US (en avance sur nous) se lancent à bras le corps sur cette approche qui leur ressemble (SCRUM) (puis retour de XP sous software craftsmanship et Kanban).

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[hors sujet] Musique & confinement 30 oct. 2020

En ce jour un du deuxième confinement de l’an vingt vingt je me permets un hors sujet complet aux thèmes de ce journal : installation musicale pour passer du temps agréablement en restant chez soi. J’espère que vous pardonnerez cet écart et j’espère que ce témoignage donnera envie ou servira à d’autres musiciens. L’installation dont je parle m’a été elle-même soufflée par N1k0, merci ! Ainsi donc deux objectifs pour cet article hors sujet : partager, et me faire un aide-mémoire.

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Triangulation 22 oct. 2020

On vient de me poser la question “que pensez-vous d’une direction produit qui cherche à commencer des sujets plus qu’à les finir pour essayer le plus de chose possible ?”. On m’avait interrogé sur “comment rapidement faire passer une équipe dans la phase de storming pour vite atteindre le norming1 ?”.

À toutes ces interrogations la sagesse veut que l’on réponde “cela dépend du contexte”. Cette sagesse n’est pas le fruit du hasard, ou une pirouette pour éviter les réponses. Même elle peut laisser souvent nos interlocuteurs sur leurs faims. En fait c’est surtout un leitmotiv pour nous rappeler combien le contexte, le système en place, est important, et qu’une approche ou qu’une solution qui fait sens pour l’un, n’est peut-être pas faite pour l’autre.

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Scrummaster en détresse 26 sept. 2020

Cette semaine, un scrummaster avancé en détresse. Il vient d’un autre milieu que la facilitation, le coaching, et il vient de se prendre de plein fouet la réalité, comme dans ces vieux manèges “palais des glaces”, boom, comme John Lee Hooker, boom boom. Une grande conversation se lance. Pour certains acteurs externes qui nous observent : “il est triste de voir ce que ce système fait aux sm/coach/aux passionnés d’excellence. Il est dur.” Mais c’est le coeur de notre métier, c’est çà que l’on aime, c’est exactement ce que ne voient pas tous les gens qui critiquent le coaching.

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