Les graphes Kanban racontés aux enfants 2

C’est bon tu as rangé ta chambre ? Tu veux une autre histoire de graphe ? D’accord, allez va pour celle de l’abominable carte de contrôle. Plus simple, plus court, tu vas vite aller te coucher. Je te l’avais promis je te la raconte. C’est bien pour te faire plaisir pfff mais celle là elle ne va t’emballer. Bon tu sais, ton jeu de billes, la variation que tu appelles du “mur”. Tu dois lancer les billes le plus proche du mur mais elles ne doivent pas toucher le mur.

Règle du jeu de billes dit du “mur”

Tiens sur ton sac de billes y’a marqué : Pour cette règle il faut se placer à 3 mètres d’un mur ou d’un trait tracé au sol à la craie. Chaque joueur va devoir lancer sa bille en direction du mur mais attention il ne doit pas le toucher sinon c’est perdu. Le joueur qui place sa bille le plus près du mur a gagné.

Tu y jours toi au “mur” ?

Tu y joues toi au “mur” avec tes billes à la récréation ? Oui. Bon, ça va m’aider. Bon donc imagine plusieurs billes prêt du mur.

Et puis hop ! Comme par magie on le regarde dans un miroir. Le trait du mur se trouve en bas. Mais c’est toujours la même chose, comme dans ton jeu, plus les billes sont loin du mur, moins bien c’est. C’est pour que tu comprennes l’impression visuelle que tu dois rechercher en regardant ce graphe. Combien de billes ? Sont-elles près du mur ou loin ? Dernière chose : imagine que tu jettes une bille par jour et à chaque fois tu te décales de quelques centimètres vers la droite. Tu peux ainsi mesurer tes progrès, ou pas, jour après jour.

Les questions que tu vas te poser

Les questions que tu vas naturellement te poser : est-ce que je progresse ? C’est à dire est-ce que mes billes se rapprochent de plus en plus du mur ? Est-ce que je suis constant ? Est-ce que j’ai des résultats différents selon les types de billes ? Est-ce que je peux en déduire ma compétence moyenne ? Est-ce que je touche ma bille quoi.

Avec les gens farfelus qui travaillent avec moi

Avec les gens farfelus qui travaillent avec moi voilà l’allure que cela prend. Tu peux cliquer sur l’image. Et si tu veux épater tonton Julien tu peux même utiliser le fichier excel. Je ne sais pas comment font les autres. Mais tu fais simplement défiler sur la ligne du bas, celle du “mur” dans mon exemple, les jours qui passent. Et quand tu lances une bille, tu notes à combien de centimètres elle est arrivée. Ou ici le nombre de jours qu’il a fallu à une activité pour être complètement réalisée depuis son démarrage jusqu’à la fin. Le temps qu’il a fallu depuis ce que tu estimes être le début (au moment où tu as l’idée ? Au moment où tu démarres vraiment ? ) jusqu’à ce que tu estimes être la fin (au moment où les autres bénéficient de ton idée ? Au moment où ton idée est prête ? Intéressantes questions non ? ).

Tu as vu, j’ai aussi estimé dans mon exemple que trois éléments pouvaient être lancés, ou finis, le même jour, et je me suis amusé à dire que l’une était une bille de verre, l’autre de terre, et des boulards, mais ils n’arrivent pas tous les jours. Bon on voit qu’il y a moins de boulards que de billes, et que c’est plus dur : si je reprends l’image du mur tes boulards sont plus loins, dans mes exemples en organisations cela veut dire que l’on a mis généralement plus de temps à faire un boulard qu’une bille en verre ou en terre. Mais tu vois aussi que de façon assez générale les billes de verres mettent plus de temps que les billes de terre (plus de temps à réaliser toutes les activités du début à la fin). On voit les durées moyennes : les billes c’est entre cinq et quinze jours. On voit les accidents : Qu’est ce qui s’est passé avec les éléments du troisième et du quinzième jours ? Et ce boulard perdu le septième jour ? C’est important à analyser. Il ne s’est rien passé ces jours là précisément, mais ces éléments ont mis un temps anormal à être réalisés et cela est visible à ce moment (dans le graphe, avant sur le Kanban lui même). Pourquoi ?

Pareil il faudra savoir pourquoi cette bille de terre a été si rapide (si proche du mur dans mon exemple) le onzième jour. Était-ce vraiment une bille ? Est-ce que tu t’es rapproché involontairement ?

Si tu tiens ce genre de tableau pour tes lancés de billes, tu vas peut-être te rendre compte que de temps en temps quand Johanna t’observe tes lancés ratent complètement. Johanna te fait de l’effet. Il faudrait s’améliorer car c’est justement pour le sourire de Johanna que tu fais cela. Pour une organisation si elle sait limiter ces écarts elle saura mieux prédire ce qu’elle est capable de faire. Là elle se dirait qu’en moyenne une activité est réalisée de début à fini en huit à dix jours, avec une durée minimum de cinq jours et maximum de quinze jours. Le reste étant des accidents sur lesquels investiguer.

Ça voudrait dire quoi progresser ?

Ça voudrait dire éviter autant que possible les écarts inattendus et incompréhensibles. Cela serait bien que même en présence de Johanna tu saches que tu vas faire une bonne bille, sans te laisser influencer.

Ça voudrait dire réduire le spectre des possibles : plutôt que d’avoir un écart possible entre cinq et quinze jours : plutôt l’avoir entre sept et douze jours. Pour toi c’est encore plus savoir par avance ta compétence de lancé de billes, savoir avec plus de certitude que tu vas pouvoir certainement battre encore Geoffrey ou William. Dans ces deux premières améliorations : tu te donnes plus de certitudes sur ta capacité, moins de volatilité.

Enfin naturellement c’est améliorer ta performance : c’est à dire faire des temps plus courts, rapprocher les billes du mur.

L’idée c’est que si ton graphe a des points dans tous les sens c’est comme un tireur à la fête foraine qui aurait troué partout sa cible : autant de la chance que de hasard. Toutes les flèches ou les balles d’un bon tireur seraient près du centre, regroupées. Pareil pour toi, si ton graphe est erratique, c’est à dire avec des points un peu partout sans cohérence, c’est que tu n’es pas vraiment discipliné dans ta maitrise de la bille. Après la cantine, avec le sourire de Johanna, où quand Quentin te taquine, ou encore bien concentré face à Antoine : est-ce que tu es a peu près sûr du résultat ou cela peut-il aller dans tous les sens ?

Pour toi le graphe montre si cela va dans tous les sens ou pas, si tu vas savoir avec assez de certitudes épater Johanna ou battre Geoffrey et William, et si au fil du temps tu deviens plus compétent. Pour une organisation c’est pareil : est-ce qu’elle est disciplinée ou erratique ? Est-ce qu’elle sait avec assez de certitudes le temps que va prendre chacune de ses activités ou sa volatilité est trop grande ? Enfin si elle s’améliore. Comment cette amélioration arrive ? En s’interrogeant collectivement sur comment s’améliorer (au travers de rétrospectives par exemple). Avec l’intégration de limites qui peuvent introduire une stratégie plus claire, et qui peuvent améliorer le flux en poussant à arrêter de démarrer des choses, pour commencer à en finir. Avec une gestion en flux tiré plutôt que poussé. Tout cela est évoqué dans les liens Kanban plus bas.

Le rythme autour de ces graphes

Que cela soit le Cumulative Flow Diagram précédemment évoqué (lien ci-dessous) ou le Control Chart le mieux c’est de ne pas réfléchir et de commencer à stocker les chiffres au plus tôt. Comme des fleurs qui bourgeonnent les diagrammes prendront du sens avec le temps. Comme une pâte qui gonfle : laisser reposer un temps en stockant les chiffres. C’est au bout d’un ou plusieurs mois que vos graphes prennent du sens.

Ça te plait que je te dise de ne pas réfléchir. Mais écoute, et je ne vais pas te le répéter de si tôt, souvent on réfléchit bien trop avant d’agir. Allez file jouer avant que je n’y réfléchisse.

Sur Kanban